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Fragments d’Histoire de la gauche radicale
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"nous ne pouvons plus travailler à n’importe quelle condition"
Article mis en ligne le 13 avril 2013
dernière modification le 17 novembre 2013

par ArchivesAutonomies

Communiqué de presse daté du 10 avril 1978. Signé : "Pour la compagnie de l’Escabeau, Luce Trapenier". Document transmis à René Lourau par Hélène Deville et son fils Julien.

FERMETURE DU THÉÂTRE MOUFFETARD LE 8 MAI 1978

"De lénine a punk rats"

Quels que soient les dirigeants qui ont animé le théâtre Mouffetard, on est bien d’accord pour dire que ce lieu a eu l’originalité et la constance de permettre à de nombreux artistes de se faire connaître alors qu’ils étaient ignorés de tous et qu’aucun moyen public, ni privé ne leur était accordé.
Le théâtre Mouffetard appartient à la Maison Pour Tous, sortie d’une Université populaire animée par Lucien Herr, et où s’exprimèrent entre autres... elle devient la première Maison de la Culture.
Le théâtre a connu un rayonnement très important et a accueilli de nombreux inconnus qui par la suite devinrent Raymond Devos, Roger Blin, Tania Bala-chova, Raymond Rouleau et tant d’autres...
En reprenant la gestion du théâtre Mouffetard, en décembre 76, la jeune compagnie de l’Escabeau, a voulu suivre cette tradition. Arrivant motivée, disposée à re­nouveler cet endroit et à continuer de permettre aux jeunes troupes d’y produire leurs créations, la première des réalités à laquelle elle a été confrontée ce fut l’occu­pation des lieux par l’équipe précédente, licenciée depuis peu par la Maison Pour Tous.
En effet, faute de moyens d’existence, non-subventionnée depuis 10 ans, la Maison Pour Tous a connu et connaît toujours, de nombreuses difficultés, tant par rapport aux pouvoirs publics qu’internes.

La première de nos préoccupations fut de réinstaller un climat propice à la création théâtrale.

  • réinstaurer des ateliers de créations
  • préparer des spectacles en fonction de ces ateliers.
  • proposer le travail de jeunes troupes de théâtre, de musique, de théâtre pour les enfants.

    La vocation de réaliser un théâtre-tremplin aux jeunes troupes, ainsi qu’à nous-mêmes, et se substituer aux ateliers de créations quasi inexistants à Paris étaient nos objectifs premiers.

    Alors pourquoi une fermeture ?

    Cette forme de théâtre est pourtant bien une né­cessité reconnue par tous et qu’offrait le théâtre Mouffe­tard.
    Déserté par la presse et souvent par le public lui-même, les derniers militants quittent le navire...
    L’atelier de Daniel Mesguich, celui de Bernard Lubat et actuellement nous, partons.
    Nous ne voulons plus dissimuler la misère à laquelle nous sommes réduits, plus de faux semblant, le cons­tat :
    Le théâtre est tenu par une équipe de bénévoles, comédiens eux-mêmes, il ne survit que par ses recettes.
    Les pouvoirs publics se désintéressent complètement de son sort, et de celui des jeunes troupes, et ne lui accorde aucune sorte d’aide depuis plusieurs années. Notre demande de subventions est restée sans réponse.

    Conclusion :
    Nous ne pouvons plus travailler à n’importe quelles conditions. Cette forme de travail nécessite l’aide des pouvoirs publics, car son objectif n’est pas commercial mais culturel.
    Victime actuellement de la violence et du vanda­lisme, des agressions de groupes qui viennent réguliè­rement nous casser et nous voler notre matériel, im­puissant par faute de pouvoir remettre le théâtre en état, d’assurer notre matériel et celui des troupes nous ne pouvons plus nier ces réalités.
    Plus de trompe-l’œil, de décor en carton pâte, notre dernière pièce s’attache à cette réalité première et s’intitule :

    "SEULS LES RATS SURVIVRONT" PUNK RATS de Jacky Paupe

    Écrite dans ce langage précis et rude de la rue, elle ne dissimule pas le désarroi et la solitude auxquels nous sommes réduits. Nous avions gardé l’espoir de faire renaître ce théâtre de quartier, dans ce Ve arron­dissement, lui aussi en pleine mutation, transformé en "hameaux mouffetard", de standing, perdant de plus en plus de son originalité, et qui justement avait besoin d’un lieu où précisément s’opérait ce chan­gement.

Théâtre Mouffetard