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Fragments d’Histoire de la gauche radicale
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Avant propos au livre de J. Harper (Pannekoek)
Article mis en ligne le 8 juin 2015
dernière modification le 3 juin 2015

par ArchivesAutonomies

Nous commençons dans ce numéro d’Internationalisme la publication de l’œuvre de J. Harper : Lénine en tant que philosophe.
Cette brochure de plus de 100 pages parus en 1937 en allemand. De larges extraits ont été publiés dans plusieurs revues d’avant-garde en Amérique. Elle parait aujourd’hui pour la première fois en France. Malheureusement nos faibles moyens ne peuvent assurer une grande diffusion en une édition imprimée comme nous aurions voulu le faire, de cet écrit en tous points remarquables.
J. Harper occupe dans le mouvement révolutionnaire une place prépondérante dans la lutte contre les déformations idéologiques et l’opportunisme politique. Dans cet ouvrage, il aborde des problèmes fondamentaux du mouvement ouvrier, e de l’idéologie marxiste. Que l’on soit d’accord ou non, avec toutes les conclusions qu’il donne, personne ne saurait nier la valeur énorme de son travail qu’il fait de cet ouvrage, au style simple et clair, un des meilleurs écrits théoriques des dernières décades.
Dans Lénine en tant que philosophe J. Harper continue la voie de la pensée socialiste dans ce qu’elle a de plus scientifique et de plus dynamique. A ce titre il apporte une contribution de premier ordre au mouvement révolutionnaire et à la cause de l’émancipation du prolétariat.
La dégénérescence de l’I.C. a entraîné un désintéressement inquiétant dans le milieu de l’avant ¬garde pour la recherche théorique et scientifique. A part la revue Bilan publiée avant-guerre par la fraction italienne de la Gauche Communiste et les écrits des Communistes de Conseil dont fait partie le livre de Harper, l’effort théorique du mouvement ouvrier européen est quasi inexistant. Et rien ne nous paraît plus redoutable pour la cause du prolétariat que l’engourdissement théori¬que dont font preuve ses militants.

Parlant du magnifique développement qu’a connu le mouvement socialiste en Allemagne dans les années 70, Engels explique qu’une des raisons, et non la moindre, de ce développement est le fait que les ouvriers d’Allemagne "ont conservé le sens de la théorie presque complètement perdu par les classes dites ‘éclairées’ ", et il ajoute :

"Combien est immense cet avantage, c’est ce que montrent, d’une part l’indifférence toute théorique qui est une des principales raisons pour lesquelles le mouvement ouvrier anglais progresse si lentement malgré la magnifique organisation de certains métiers, et, d’autre part le trouble et les hésitations qu’a provoqués le Proudhonisme sous sa forme primitive chez les Français et les Belges, et, sous sa forme caricaturale que lui a donnée Bakounine, chez les Espagnols et les Italiens".

Jamais encore le mouvement ouvrier n’a connu plus qu’à l’heure actuelle, le trouble et les hésitations dont parle Engels. Cela est le produit d’une part, de la longue chaine de défaite terribles essuyées par le prolétariat dans tous les pays, et d’autre part, la conséquence de l’habitude prise par les militants révolutionnaires de substituer à l’étude des problèmes l’application des formules toutes faites.

Le marxisme a cessé d’être ce qu’il était pour Marx, Engels et leurs compagnons, c’est-à-dire une méthode d’investigation permettant de saisir la réalité sociale et d’intervenir. Il s’est transformé entre les mains des adeptes bornés en un catalogue de préceptes tout prêt à être appliqué aux maux sociaux. D’une méthode scientifique, ils ont fait du marxisme un système dogmatique. Et plus que jamais Marx aura eu raison de dire "Moi, je ne suis pas marxiste".

Cette déformation du marxisme, que nous devons aux "marxistes" aussi empressés qu’ignorants, trouve son pendant en ceux qui, non moins ignorants, font de l’"anti-marxisme" leur spécialité propre. L’anti-marxisme est devenu aujourd’hui l’apanage de toute une couche de semi-intellectuels petits bourgeois déracinés, déclassés, aigris et désespérés qui, répugnant au monstrueux système russe issu de la révolution prolétarienne d’Octobre, et répugnant au travail ingrat, dur, de 1a recherche scientifique, s’en vont par le monde, les cendres de deuil sur la tête, dans une "croi¬sade sans croix", à la recherche de nouveaux idéaux, non à comprendre, mais à adorer.
Dans une période réactionnaire comme la nôtre, la fuite et la désertion sont inévitables dans les rangs des révolutionnaires et les cris des sceptiques devenus philosophie du désespoir trouvent naturellement un certain écho parmi les militants.
Contre les apologistes ignorants et les non moins ignorants détracteurs du marxisme, également nuisibles au mouvement d’émancipation de la classe ouvrière, les militants révolutionnaires ne sauront réagir qu’en s’inspirant de ce conseil du vieil Engels :

"A NE JAMAIS OUBLIER QUE LE SOCIALISME DEPUIS QU’IL EST DEVENU UNE SCIENCE EXIGE D’ETRE TRAITÉ COMME UNE SCIENCE, C’EST A DIRE D’ETRE ÉTUDIÉ".

INTERNATIONALISME

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Dans les numéros suivants d’Internationalisme nous ne mettrons pas en ligne le texte de Pannekoek, nous renvoyons le lecteur sur le site où est il disponible.
Les Cahiers Spartacus ont publié ce livre au début des années 1970, il est aujourd’hui épuisé.
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